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Opinion

Une histoire de riz qui choque: Quand une frange de nos compatriotes fouille dans les décharges :

par Edouard Samboe - 2024-10-03 00:47:31 389 vue(s) 0 Comment(s)

Cette semaine, le Togo a captivé l’attention mondiale, non pas pour un festival ou une avancée technologique, mais pour deux événements tragico-burlesques. D’abord, une réunion au siège de la CDPA virant à la baston, avec en prime des députés et journalistes tabassés. Ensuite, des citoyens fouillant une décharge à Agoè Ahonkpoé pour récupérer du riz avarié. Comme quoi, au Togo, même le riz peut avoir une seconde vie… si on est assez affamé.

Au Togo, ces derniers jours, on aurait cru que la réalité prenait des airs de satire tragique. D’un côté, des citoyens se font rouer de coups lors d’une réunion politique, et de l’autre, une chasse au trésor des temps modernes se déroule dans une décharge publique, où le prix à gagner n’est autre que… du riz avarié. Deux événements qui, à première vue, semblent appartenir à des récits distincts, mais qui racontent tous deux une histoire commune : celle d’un peuple aux abois, entre violence et survie.

Dans une scène digne d’un film à suspense, les habitants de Lomé se bousculent dans un dépotoir, éclairés par la lune (ou peut-être quelques téléphones), pour récupérer du riz avarié. Là où certains voient des ordures, d’autres voient une opportunité. Consommer ou revendre ? C’est peut-être la question du siècle. Quoi qu’il en soit, ces citoyens nous rappellent que, quand on est vraiment affamé, le riz moisi vaut plus qu’un sermon sur la sécurité alimentaire.

Si ces événements ont pu soulever l’indignation, ce n’est pas grâce à un rapport officiel, mais bien aux réseaux sociaux, le nouveau tribunal populaire. TikTok, le réseau où l’on danse d’habitude, est devenu une scène de tragédie où la Ligue Togolaise des Consommateurs a appelé à retrouver les coupables du déversement du riz périmé. Finalement, les autorités ont confirmé que le riz devait être détruit. Détruit ? Oui, mais visiblement pas assez loin des yeux et encore moins des estomacs.

Ce n’est pas la première fois que des produits avariés se retrouvent « accidentellement » dans des lieux publics. Et soyons honnêtes, si ce n’était pas aussi grave, on aurait presque ri. Les normes pour la destruction des produits périmés sont pourtant bien établies. Mais visiblement, entre la théorie et la pratique, il y a un sacré fossé… ou plutôt une décharge. Qui aurait cru qu’une simple erreur logistique pourrait transformer un dépotoir en marché nocturne ?

Forces de l’ordre ou… résurrection du bon sens ?

Au lieu de jouer les Sherlock Holmes pour traquer les revendeurs de riz avarié dans les marchés, il est peut-être temps de poser la vraie question : comment en sommes-nous arrivés là ? Pourquoi, en 2024, des citoyens doivent-ils fouiller des décharges pour se nourrir ? Spoiler : la vraie solution ne réside pas dans une chasse aux sorcières, mais dans une guerre sans merci contre la pauvreté qui mine le pays.

Le problème n’est pas seulement que du riz périmé ait trouvé preneur, mais que la pauvreté pousse tant de familles à s’en réjouir. Quand on est affamé, on ne demande pas la date de péremption. Dans un pays où la faim prend racine, même du riz avarié devient une bénédiction pour ceux qui luttent pour survivre.

Violence politique et misère alimentaire : même combat ?

Ces deux incidents – les agressions au siège du CDPA et la ruée vers le riz – dévoilent une triste vérité : quand la dignité se perd, tout est permis. Entre les coups de bâton pour des idées politiques et les bagarres dans les décharges pour du riz, on découvre un Togo où les citoyens sont en lutte permanente, pour leurs droits comme pour leur survie. Et dans les deux cas, le pays en ressort meurtri

Tout ceci, bien sûr, prête à une réflexion plus large sur la gouvernance. Pourquoi la destruction des produits avariés est-elle toujours mal gérée ? Pourquoi, en 2024, des citoyens doivent-ils encore risquer leur santé pour manger ce qui aurait dû être détruit ? On est en droit de se demander si le riz est vraiment le seul à être périmé ici…

Il est grand temps pour les autorités de se pencher sérieusement sur les causes profondes de cette misère. Parce que si on en est à surveiller des décharges pour éviter que les citoyens ne s’y servent, c’est qu’il y a quelque chose de pourri… et pas que dans le riz.

Pour rétablir un peu de dignité et de bon sens, il faudra plus que des communiqués ministériels. C’est une réforme en profondeur qui s’impose, afin de s’attaquer aux vraies causes de la pauvreté et de redonner un sens à la protection des citoyens. Entre les coups de bâton politiques et les décharges publiques, on a bien besoin de retrouver un peu d’humanité dans tout ça.

Robert Douti

Laabali

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