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Éducation

«Je ne voulais pas être mère tout de suite, ni me marier»

par Edouard Samboe - 2023-01-06 15:41:56 941 vue(s) 2 Comment(s)

Backwife (femme renvoyée) ; Pokpaagl ( femme répudiée), etc. Ce sont entre autres, les concepts péjoratifs attribués aux filles mères, aux femmes répudiées et celles revenues au sein de leurs familles d’origine. Les causes de ce phénomène sont légions, mais leurs conséquences demeurent plus drastiques, dans plusieurs villages de Dapaong. Entre l’ignorance des méthodes contraceptives, l’analphabétisme, la non maîtrise de la santé sexuelle et reproductive , les adolescentes paient le lourd tribut: la déscolarisation, les avortements clandestins et la pauvreté…..

«Je ne voulais pas être mère tout de suite, ni me marier et encore moins abandonner mes études». C’est ainsi que nous confie Honorine Larbik; mère d’une petite fille de 9 mois. A 19 ans révolus, elle voit son avenir avec incertitude, avec son bébé en main, lequel n’a plus revu son père depuis deux semaines.

C’est sous un Mélina ( un arbre local) qu’elle raconte sa mésaventure, dans son village natal de Boulogou ( préfecture de Tandjouaré). Catholique pratiquante, dernière d’une famille de neuf enfants, Hono comme on l’appelle affectueusement, aspirait devenir une religieuse. Mais, aujourd’hui, son destin de vie consacrée à la foi catholique, s’est arrêté brusquement. Désormais, elle pourrait participer à la messe en tant que laïque, sans communier, en attendant son mariage chrétien. C’est que le conseille son catéchiste, Jacques Kombaté, pour la consoler.

Selon son récit, il y a de cela une année, elle était encore en classe de troisième. Après un premier et un second échec au BEPC ( brevet d’études du premier cycle), elle décide abandonner les bancs ( les études). « Comme je n’avais pas le bac ( baccalauréat), je savais que je ne deviendrai plus une religieuse. Je voulais faire la couture. Après trois mois de contrat, à Cinkassé ( ville frontalière avec le Burkina), je découvre que je suis enceinte», explique t-elle.

Une nouvelle qui va la surprendre. La jeune mère explique qu’elle ne savait pas qu’elle deviendrait enceinte, après un seul rapport sexuel a suffit. Son conjoint, qu’elle explique l’avoir connu quelques jours plus tôt, n’est qu’un sans emploi ( chômeur). Avec la nouvelle de la grossesse, Honorine Larbik quitte son lieu d’apprentissage pour rejoindre la maison de son conjoint, au grand dam de celui-ci. C’est le début d’un mariage et d’une vie de couple qui n’ont été envisagés , encore moins préparés. Puis s’en suivent les mésententes entre couple et la pauvreté.

« Honorine a gros sur son cœur », comme on le dit la-bas, ce qui veut dire colérique. Pour cause, elle a été frappée par son conjoint lors d’une dispute de couple. Aussi elle a donc ramassé ses bagages pour rejoindre ses parents . Mais, c’est sans ignorer le poids des cultures et des traditions, qui interdisent les filles mariées de revenir définitivement dans la famille de leur père. Une situation qui hante Honorine Larbik qui sait que s’éterniser dans sa famille natale comme une jeune fille ne sera jamais acceptée ni par ses parents encore moins par ses frères. Face à ces péripéties, elle regarde sa fille et soupire.

Comme Honorine, elles sont nombreuses, ces jeunes filles à prendre des grossesses indésirées , à abandonner leurs études et leurs projets de vie. C’est le cas de Martine Kombaté, 18 ans, élève en classe de terminale au Lycée de Bombouaka. Martine a pris la grossesse de son copain Alain Douti, de même classe. «Après une tentative d’avortement clandestin, selon les parents du garçon, elle saignait et est hospitalisée ; finalement , l’enfant naît, un garçon. Martine se voit arrachée son bébé, et est donc accusée d’avoir tenté de tuer son fœtus. Elle saisis la justice selon ses dires de ses parents et ne bénéficie point de soutien. « C’est avec chagrin que j’ai quitté ma famille pour me rendre à Bassar ( une ville du centre du Togo) , abandonnant mon fils. Je supplie qu’on me rende mon fils , mais en vain. Je demande aussi de lui rendre visite, mais on me le refuse», explique Matine Kombaté.

Les études sont abandonnées, ainsi que les projets de devenir avocate, comme le souhaitait Martine Kombaté. Aujourd’hui, après plusieurs tentatives infructueuses de voir son enfant, elle projette de rendre au Burkina pour travailler dans une buvette comme serveuse, à l’instar de sa camarade Yobar Dametchiré. Cette dernière , la vingtaine vit à Tenkodogo ( une ville au centre du Burkina Faso, depuis une année. Après avoir été enceintée et abandonnée dans le village de Yanyane ( oeust de Dapaong) par un orpailleur de Galamsey ( Ghana), elle a élu domicile au Burkina, avec sa petite d’à peine un an. Serveuse de bière, elle sensibilise ses camarades sur les séductions des hommes.

Dans certains villages, les enseignants seraient à la manette. Comme à Tindgandongou , Pligou et Bombouaka, certains parents d’élèves pensent que les éducateurs ont des responsabilité dans les grossesses des adolescentes. A Boulougou, on pointe du doigt certains enseignants qui ont carrément épousé des élèves et leur contraint abandonner leurs études.

Les faits similaires sont notés dans certaines contrées. Ici, au quartier Tingban de Dapaong ville ( au nord du Togo), certains enfants portent les noms de leurs géniteurs dont ils n’ont jamais vu. On parle des enfants de « Ebomaf», ces employés de l’entreprise Ebomaf qui construisaient des routes dans la ville et qui seraient, selon les dires des gens, les géniteurs desdits enfants, dont les mères sont des élèves. C’est aussi le cas de Ubertine, 21 ans, mère de jumelles , elle-même orpheline de père et mère, dont le conjoint n’a pas reconnu ses enfants. Elle confie que c’est lors d’un voyage sur le Burkina Faso, qu’elle fit la connaissance du père de ses enfants. «Celui-ci , explique Ubertine, a refusé de reconnaître la grossesse et les enfants, cela fait bientôt deux ans». Ubertine qui vit auprès de son oncle a écourté ses études pour s’occuper de ses enfants.

Ailleurs, dans le village de Katindi ( Est de Tône ), Malpo Blimpo, mère d’une fillette de 3 ans, qu’elle a eu avec un aventurier venu d’un pays voisin accuse «les aventuriers de séduction sans respect sur les filles mineures». Des témoignages que partagent les jeunes filles de Yembour ( ville frontalier au Ghana), Warkambou ( village frontalier au Ghana). Ces filles sont en majorité mineures, et leurs grossesses sont à venues souvent d’abus sexuels et sont donc des grossesses non désirées.

Ces cas de filles mères sont légions dans plusieurs villages et les géniteurs en ont conscience; C’est le cas de Djimongue Maldib qui a enceinté deux filles de deux villages voisins, Sannaaba et Kpalbiaga ( préfecture de Cinkassé). « je prends soin de mes enfants, mais je ne veux pas de femmes tout de suite, parce que je peux prendre soin d’une femme, je n’ai pas de travail. Je fais des concours, mais cela ne marche pas». Au cœur de la ville de Dapaong, on rencontre ces types de garçons géniteurs de plusieurs enfants, qui disent « prendre soin de leurs enfants». Comme à Pana, Madjoua Djabigou , un jeune homme , mais explique: « j’ai eu vite un enfant avec ma copine, j’aide ma copine, mais je ne veux pas de femmes chez moi».

L’extrême pauvreté…..

«La pauvreté, l’absence de perspectives économiques poussent les jeunes filles dans les bras des hommes contre de l’argent», explique Manubar Kolani, chef-coutumier de Barkoissi. Selon un religieux franciscain, l’éducation de base et de maîtrise de soi, a cédé la place à la télévision qui autorise tout. Dans la plupart des villages, les centres d’écoutes et d’accompagnement des jeunes n’existent point. Ainsi, l’ignorance, le poids des cultures et des traditions empêchent la non maîtrise de la santé sexuelle et reproductive. Pour Reyhanath Touré Mamadou, responsable de l’association Tchaouwourè, une structure qui soutient l’émancipation des jeunes filles  » la région des Savanes, est l’une des région au Togo, dans laquelle la femme est reléguée au dernier plan ». Une position que partage Conforte Kabissa Lamboni, responsable d’une association qui aide les femmes à se prendre en charge. » le poids de la culture et de la tradition freine les femmes, souvent les femmes sont battues pour avoir pris la parole en public, au milieu des hommes ». En en croire Djibril Pikissi, responsable préfectoral de l’action sociale ( structure étatique en charge de la prise en charge des filles mères),  » le phénomène est légion , un phénomène social ».

De Pligou à Kpebongou, de Naki-est à Naki-Est, de Boulogou à Barkoissi, de Kantindi à Goussiette de Nagouni à Borgou, à travers ces différents villages, les filles mères, les femmes avec enfants, les grossesses indésirées ont encore la peau dure. Avec un impact direct sur les conditions de vie, d’éducation et de formation des jeunes filles, sur une région, déjà en manque de presque de tout. Monoka Nadjagou, 22 ans, titulaire du Licence en agronomie explique le phénomène:  » on a l’impression que pour nous les filles, lors que tu as les seins, la société t’oblige à te marier. Indirectement, on t’oblige à abandonner tes projets de vie. Ces pratiques freinent les ambitions de la femme », relève la jeune. Pour échapper à ce phénomène social, les jeunes filles entreprennent pour se prendre en charge.

Selon les indices du développement du Togo, la région des Savanes au nord du Togo est la plus pauvre, en terme de revenu par habitants, une région ciblée par les groupes armées extrémistes.

Edouard Kamboissoa Samboé

Laabali

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2 comments

  1. Salut
    Je lis souvent vos publications
    Je salue la qualité des analyses et surtout l’originalité de vos interview
    Néanmoins je suggère que vous prenez soin de vous faire livre pour minimiser les erreurs de frappe.
    Merci bien vous faites l’honneur de la savane.

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