Dans cette tribune, Dr Congo P. Nathanaiel Enseignant associé à l’Université Joseph KI-ZERBO, analyse les événements au Burkina Faso. Lisez plutôt, in extenso la tribune.
Au Burkina Faso, ces dernières décennies de gouvernance aux résultats mitigés ont vu des gouvernements se succéder, s’entremêler et se ressembler. A leurs têtes, des hommes forts, selon les contextes, ont pris le contrôle de la gestion de l’État, de gré ou de force, pour apporter leur contribution à un Burkina Faso de prospérité, de progrès et d’espérance. Malheureusement, le constant est demeuré le même au fil du temps. « L’Étalon au galop » à la crinière si fière et si élégante, se fait toujours attendre. Il trottine, faisant un pas en avant et deux pas en arrière, telle une malheureuse chevauchée vouée à l’échec et au perpétuel recommencement des erreurs, des fautes et des compromissions du passé.
Cette dynamique perpétuelle d’un cycle sans fin, finie par faire croire à la thèse du mysticisme du pouvoir, qui veut que « le prince » une fois au pouvoir, voient ses mains liées par des forces obscures, ennemis du développement d’un pays qui méritent mieux que les tergiversations de plusieurs décennies de pouvoir sans résultats durables. Thomas Sankara, de regretté mémoire, peut avoir des raisons légitimes de se retourner dans son illustre tombe. L’histoire nous rappelle au quotidien qu’il avait ouvert une fenêtre à l’Etalon, dans un contexte certes révolu, mais qui nécessitait du courage politique. Comment en est-on arrivé à être un mauvais élève là où l’exemple d’intégrité et de courage qui nous caractérisait était un phare pour tout le conglomérat international des peuples qui aspiraient à la liberté et au progrès endogènes ?
Ou devrions croire à la thèse surutilisée de l’impérialisme des maitres d’hier ? Ces dirigeants d’autres pays qui, comme des aiguilleurs, dirigeraient le train battant pavillon « Burkina Faso » comme ils veulent et selon leurs propres intérêts contradictoires à ceux du peuple Burkinabè. Nos dirigeants seraient-ils juste donc des « guignols » ? Est-il juste de penser que tout le mal que nous vivons aujourd’hui est du simple fait de forces obscures extérieures, amies d’hier devenues des parias aujourd’hui ? L’impérialisme ou le néocolonialisme est-il la seule explication possible et plausible aux échecs des générations successives à impulser une gouvernance vertueuse dans un pays où tout semble possible mais sous – exploité ? Si nous voulons trouver les bonnes réponses, nous nous devons de nous poser, sans complaisance, les bonnes questions.
Après les questions et les réponses, il y a une nécessité absolue de prioriser les secteurs les plus porteurs de développement, à travers la mise en place de stratégies réalistes qui replacent au cœur du progrès, la réforme du système éducatif, la réorganisation de l’administration du territoire et la moralisation de la vie publique. Il n’est guère reluisant de voir les régimes qui se succèdent mettre continuellement ces réformes au second plan, si elles ne sont purement et simplement pas jetées aux oubliettes. Pour le Burkina Faso, le courage d’un homme d’Etat se déterminera forcément à sa capacité à se mettre au-dessus de la mêlée pour tirer le meilleur profit de nos richesses humaines, naturelles et culturelles. L’autodétermination tant chantée, ne restera qu’un creux langage si des femmes et des hommes courageux, vertueux et intègres ne sont pas à la tête de l’État. Il nous faut impérativement et courageusement tracer les sillons pour garantir à ce beau pays un avenir radieux. Au-delà donc des émotions, il faudra de la méthode et de la stratégie. Nous en avons les potentialités et la baraka. Et nous le devons bien à nos enfants.
Les intérêts individuels, les calculs politiciens et le clanisme chronique doivent faire place à un consensus national, bâti sur une vision cohérente et réaliste du développement, qui obligera chaque génération a y apporter sa pierre, en toute responsabilité, au fil du temps. L’époque de la tergiversation doit être révolue. Le drame que nous vivons aujourd’hui est le résultat de plusieurs années de gouvernance piteuse et clanique, basée sur des politiques de développement et d’administration territoriales hasardeuses. Les réformes courageuses que nous devons d’engager urgemment, en sortant de nos certitudes et des sentiers battus, peuvent être bâties autour des éléments suivants :
En un mot comme en mille, il est urgent de replacer la culture au centre de notre approche de développement, sans pour autant se couper du reste du monde. La culture est fondamentale à l’identité et ne saurait continuer à être un secteur accessoire, aléatoire ou de discours de propagande. Nos enfants doivent être fiers de leur pays et de son histoire glorieuse. Ainsi, voudront-ils, peut-être, le servir avec courage, loyauté et patriotisme.
Dr Congo P. Nathanaiel, Enseignant associé à l’Université Joseph KI-ZERBO
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