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Santé

Lady: Orpheline à 11 ans, mère à 13 ans au CM2, à 17 ans sans enfant

par Edouard Samboe - 2023-04-13 04:50:33 1521 vue(s) 0 Comment(s)

Depuis novembre 2022, une loi régit la protection des apprenants contre les violences à caractère sexuel au Togo. Selon la substance de cette loi, l’auteur de grossesses et de violence sur les élèves ou apprentis encourt des peines d’emprisonnement et des amendes. Malheureusement, avant ladite loi, les victimes de ce fléau, notamment des filles sont nombreuses. C’est le cas de Lady, orpheline de père à 11 ans, mère à 13 ans dans le village de Kpendjaga ,  à 30 km à l’est de Dapaong.  Dans le silence, elle traine encore les séquences.

Situé à une trentaine de kilomètres à l’Est de Dapaong, dans la commune de Kpendjal ouest 2 , Kpendjaga est un village du canton de Papri. Et, c’est dans ce milieu rural, que l’histoire de Lady se joue. Kpendjaga porte le nom d’un confluent de Kpendjal, un affluent de l’oti qui l’arrose de son eau. Le 1e avril dernier, lorsqu’on nous rentrions dans ce village, sous un soleil de plomb, c’est une canicule qui chauffe les habitants. Alors qu’on s’abritait à l’ombre d’un arbre, une demie douzaine de filles, y étaient. Elles s’affairaient autour de leur métier, le tissage.  

A 17 ans, Lady, taille moyenne, est l’une d’entre elles. C’est aussi une apprentie tisserande. Contrairement à la joie de ses camarades, elle nous présentait un visage fermé, toujours les yeux fixés sur le métier à tisser.  A peine avions-nous entamé une discussion, que madame Fati, maitresse tisserande, auprès de laquelle apprennent ces filles, nous explique : « Depuis deux ans, elle apprend le tissage. Mais, elle a peur de ne pas finir sa formation, c’est ce qui la hante ».

Mère à 13 ans…, apprentie à 17 ans

Son histoire, c’est sa patronne qui la raconte. « Lady a perdu son père à 11 ans. Aînée de la famille, elle sera prise en charge par feu Abbé Justin Kammougue. Sa mère, contrainte par la coutume épousera son oncle mais perdra la vie deux ans plus tard suite à une césarienne qui a mal tourné. Désormais orpheline de père et de mère, elle se retrouve à la charge de sa grand-mère maternelle. Elle tombe enceinte en classe de Cm2 à 13 ans et abandonne l’école ».

L’histoire de Lady, c’est l’histoire d’une certaine catégorie de filles dans la région des Savanes. Elles vivent un quotidien hors du commun et des histoires à couper le souffle. Très jeunes, elles vivent en majorité, la perte de leurs parents, les mariages précoces et des grossesses indésirées.

« J’ai abandonné les classes, parce que j’étais tombée enceinte » nous confie-t-elle. Avant d’ajouter tristement, après un temps de silence « l’enfant n’a pas survécu ». Cette orpheline très jeune, mère très tôt, et aujourd’hui apprentie, à l’adolescence, a déjà fait l’expérience de la perte d’enfants par la mort. Mais ce qui est triste, ce sont les circonstances du drame. « C’est à la quête de l’eau que le pagne qui servait à porter le bébé au dos s’est dénoué, alors que je tentais de charger une bassine d’eau sur la tête ; l’enfant est tombé et malheureusement, il n’a pas survécu d’un choc à la tête après la chute », se remémore cette jeune dame.

Fleur du désert, le dernier espoir de Lady

Informée de la situation de lady, l’association fleur du désert l’a inscrite en formation de tissage, afin de lui donner une autre chance. Malheureusement pour elle, ce n’est pas encore le bout du tunnel pour cette âme fragile qui se retrouve avec ses petits frères et sa grand-mère très fatiguée par l’âge. Mais la pression sociale continue de planer sur Lady. Cette fois-ci c’est son oncle maternel qui exige qu’elle soit prise comme épouse en échange de sa mère défunte. Une forme de mariage sans amour, forcé par la coutume, qui voudrait selon les explications reçues « qu’elle soit la remplaçante de sa mère, auprès de ses oncles maternels ».

Pour cause, la famille paternelle de Lady n’ayant pas donné de fille en échange de sa mère, c’est à la fille qu’on tente de faire payer cette forme de dette. Pour sa patronne tout a été mis en œuvre par l’association fleur du désert et le service de l’action pour dissuader l’oncle maternel indélicat mais l’indigence pourrait annihiler les efforts fournis jusqu’ici. « Ma peur aujourd’hui se trouve beaucoup plus du côté de Lady. A vrai dire, ce n’est pas simple pour elle et ses jeunes frères. Leur grand-mère est très vieille et ne peut plus rien faire. C’est difficile pour eux de trouver à manger. Ce sont les aides ponctuelles de l’association qui leur permet de survivre. Entre temps, elles ont bénéficié d’une aide financière de la part de l’Anadeb (Agence nationale pour développement à la base) , mais ça c’était une fois en passant. Comme elle n’a rien, je crains que qu’elle soit trompée facilement au travers de petits cadeaux. Elle pourrait être tentée de suivre des dragueurs afin de mettre un terme à sa souffrance », s’indigne la patronne. Cependant, la fille rassure qu’elle tient à aller jusqu’au bout de sa formation afin de prendre en charge sa grand-mère plus tard.  » Si je deviens patronne, je vais aider ma grand-mère à s’occuper de mes petits frères. Je vais m’abstenir jusqu’à achever ma formation. « Affirme-t-elle

Entre la faim, la peur du mariage forcé, et les contraintes liées à la formation, Lady tente de redonner un sens à sa vie. Aujourd’hui, le poids de son passé douloureux pèse sur ses épaules, mais elle doit se battre au quotidien pour sortir de l’ornière. Deux de ses quatre frères ont déserté les bancs alors qu’ils ont à peine la dizaine. Comme Lady, ils sont nombreux, ces enfants qui se retrouvent abandonnés sans soutien dans une région où gagner un repas journalier, se soigner, avoir accès à l’eau potable et se former, demeurent encore une réalité difficilement trouvable. Pourtant, le Togo a ratifié toutes les conventions sur les droits des enfants, l’accès universel à la santé et le droit à l’éducation.

Robert Douti

Laabali.tg

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