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Gouandé-Djanfonden : La route du carburant sale qui alimente l’extrémisme au Togo

par Edouard Samboe - 2023-03-09 16:10:50 1039 vue(s) 0 Comment(s)

La ruée vers le carburant frelaté est au cœur des préoccupations des autorités togolaises. Ce pays de 56 600 km2 de l’Afrique subsaharienne côtière se trouve confronté aux menaces terroristes, depuis 2021. Au cœur des ressources qui alimentent les exactions armées dans sa partie septentrionale, se trouve le carburant frelaté. Une énergie qu’utilisent les groupes armés souvent à motos, dont la difficile tracée des pistes d’acheminement et d’approvisionnement reste une fièvre pour l’Etat. Un véritable phénomène qui échappe aux contrôles des militaires togolais et qui suscite la convoitise des groupes extrémistes qui opèrent dans le Kpendjal. Mais aussi aux frontalières du Burkina et du Bénin, dans la partie tri-frontalière, aujourd’hui bastion des combattants du GNIM et affiliés. Un système économique basé sur la fraude, qui profite à une chaine de personne, y compris les groupes extrémistes qui tuent et qui pillent.

Marché de Gouandé, 03 mars 2023, il est midi. [Gouandé est un arrondissement de la commune de Matéri, département de l’Atacora, Bénin], petite ville proche de Mandouri (chef-lieu de la préfecture de Kpendjal, Togo), soit 35 km, à l’Est. Le long des routes non bitumées de Gouandé, le carburant frelaté se vend, à chaque coin. On y rencontre des motocyclistes avec des bidons jaunes attachés à l’arrière. Mais l’épicentre de ce trafic de carburant frelaté, se trouve en plein cœur du marché. Sur un espace vide, en face d’une buvette, le trafic de carburant semble connu. Des tonneaux, des bidons jaunes, des entonnoirs, des motos et des individus qui vendent du carburant avec d’autres qui en achètent. « A Gouandé ici, le litre du carburant coûte 550 FR CFA, mais si tu en achètes plusieurs litres, on te les vend à 500 FR CFA », explique Kiniyi Marc, la trentaine, détenteur d’un tonneau du carburant frelaté. Ce jeune homme ajoute qu’il en vend depuis plusieurs années. Son fournisseur, selon ses explications vit à Matéri, chef-lieu de la commune à une trentaine de Km de Gouandé, au sud.

Comme lui, ils sont nombreux des jeunes à vivre de cette activité. Une activité devenue rémunératrice de revenue pour les vendeurs, mais aussi des acheteurs qui viennent de plusieurs villages. Parmi les acheteurs figurent des togolais, qui viennent souvent de la ville de Mandouri. Au milieu des vendeurs, on y rencontre aussi des togolais, employés par des fournisseurs béninois pour revendre du carburant aux togolais qui y arrivent. C’est le cas Bartienlé Yilou, qui vit à Gouandé depuis plusieurs années. « Je vis ici, j’étais à Matéri avant que mon patron m’envoie ici pour surveiller son stock de carburant ». A en croire ce jeune homme, la plupart des fonctionnaires togolais et des détenteurs d’engins roulants du côté de Mandouri viennent acheter du carburant. « Dans le Kpendjal , le trafic du carburant est interdit, alors ils viennent ici pour en acheter. Ils viennent chaque début de semaine, mais aussi les jours du marché ».

En effet, dans l’espace vide, on aperçoit des motos d’immatriculation togolaise. Ils sont nombreux, ces togolais venus au marché pour s’approvisionner en carburant, mais aussi en vivre. Matienné Sambiani est déplacé interne à Mandouri, après avoir été chassé à Tiwori, un village voisin. Depuis l’interdiction des autorités togolaises de vendre du carburant, il vient souvent à mandouri pour s’acheter des ignames, mais aussi se servir en carburant. « Chez nous, on ne vend pas du carburant. Il n’y a pas de station-service à Mandouri, on vient ici pour s’approvisionner pour les courses », explique-t-il. Comme lui, il y a des fonctionnaires togolais qui y sont venus pour les mêmes raisons, tel que Martin Tiembate, qui explique le besoin du carburant dans le Kpendjal devient une préoccupation. « L’interdiction de vente du carburant pour notre sécurité a soulevé d’autres inquiétudes économiques et de temps. Il faut venir au Bénin s’en approvisionner et c’est les béninois qui s’enrichissent ».

Un trafic profitable

Au cœur de ce marché, les clients du carburant frelaté viennent de tout horizon, difficile pour les vendeurs d’identifier qui viennent des zones des groupes extrémistes. Pourtant, Gouandé est situé à moins de 37 km de Djanfonden, Tiwori, Lallabiga, villages togolais ciblés par les groupes extrémistes. «  nous étions dans le village de Tiwori, mais nous sommes de béninois. On fait l’agriculture, on venait toujours commandé le carburant pour aller le revendre chez nous », explique Mintra Douamongue, qui a vendu le carburant frelaté, avant de se voir contraint par les autorités togolais d’abandonner . Aujourd’hui, tout comme lui, ils sont nombreux qui vivaient de cette activité du Togo avant d’en abandonner sous contrainte. «  Quand on vend, on cherche juste les clients, on ne cherche d’où viennent-ils ? On veut notre argent », renchérit Unweriko Miohodo, revendeur des cartes de recherches et du carburant frelaté.

Comme à Gouandé, les villages profonds de la commune de Matéri proche du Togo vendent du carburant frelaté, à travers des bouteilles. Une activité connue de la localité par les autorités. « S’ils ne vendent pas, ils vont manger quoi », réplique humoristiquement Méandé Hounkpo, enseignant de la localité. Ils sont nombreux ces jeunes qui vivent du trafic du carburant dans cette zone. « Nous, nos patrons achètent le carburant au Nigeria et on le vend ici », nous explique un autre vendeur, avant d’ajouter : « nous vendons à qui veut nos produits ».

Au cœur de ces différents villages, des boutiques de carburant poussent. Chacun tire pitance quotidienne du trafic. Pourtant, à moins de 50 km proche des frontières togolaises avec le Burkina, les groupes armés opèrent. Leurs moyens réguliers de communication sont les motos, lesquels engins ont besoin du carburant. Ainsi, selon un officier de l’armée togolaise, le trafic du carburant transit du Nigeria vers le Bénin et le Niger. Le réseau continue du Burkina, puis du Togo. « Dans l’ensemble toute une chaine en profite, il y a de l’argent dans ce trafic », ajoute-t-il. Mais ce sont les armées de ces pays limitrophes qui combattent le terrorisme qui doivent faire face à la pression terrorisme. « Difficile de savoir les pistes d’approvisionnement, mais on sait que ce sont les chemins perdus et les frontières poreuses qui permettent de faire passer du carburant frelaté », soutient le militaire. A la frontière entre le Togo et le Bénin, les agents de sécurité postés veillent au grain. Mais les contrebandes ont aussi leurs chemins, loin des voies officielles. « Moi, je transforme du carburant, jusqu’au Borgou et à Naki-est. C’était toujours à moto, à l’époque ce n’était pas interdit », explique un vendeur de carburant frelaté de Naki-est.

Sur le pont de Kpentali, l’armée togolaise postée interdit le trafic de carburant, source de financement du terrorisme. Mais dans le marché de Gouandé, il est difficile de savoir contrôle le commerce du carburant frelaté. A Mandouri, Tambate, Koundjouaré, Gnalé, Bagré, le trafic du carburant est prohibé. Mais les groupes armés tapis dans les forets , eux ils en trouvent pour opérer. Ils savent où, en trouver, dans la mesure où dans l’arrondissement de Gouandé, le carburant frelaté se vend à ciel ouvert. Le marché de Gouandé et de ses environs peuvent se voir considérés comme le nouvel épicentre du trafic de carburant frelaté, non seulement pour certains villages de Kpendjal, mais aussi des localités écumées par les groupes extrémistes, dans la partie tri-frontalière entre le Benin, le Togo et le Burkina Faso.

Edouard Kamboissoa Samboé

Laabali.com

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