Le 22 août 2022, un engin explosif endommageait une jeep de l’armée togolaise, faisant des blessés dans les rangs des forces armées togolaises (FAT). Un mois plus tôt, dans la nuit du 14 au 15 juillet, trois villages dont Blamonga, Kpembolé et Kpekankandi étaient visités par des enturbannés, qui égorgèrent plus d’une dizaine de civils en majorité des hommes. Ces incidents ont lieu dans la préfecture de Kpendjal, plus précisément dans le canton de Koundjoaré, à 25 km de Mondouri, chef-lieu de la préfecture. Une localité d’extreme nord-Est du Togo qui fait frontière avec le Bénin ( préfecture de Matéri) et le Burkina ( province de la Kompienga). Depuis ces dernières dates, aucun incident n’est rendu public, pourtant les affrontements éclairs sont légions avec des victoires partielles des FAT. Voici quelques unes des raisons de la montée en puissance légère des FAT.
La mort des éléments des forces spéciales de l’opération Koundjoaré reste indélébile dans les esprits de la plupart des soldats rencontrés dans le Kpendjal. Pour rappel, dans la nuit du 10 mai 2022, une attaque complexe des combattants du GNIM/GSIM contre un détachement des éléments de l’opération Koundjoaré avait fait 08 morts et 13 blessés, tous militaires, membres de cette opération. Le point culminant de ces attaques est atteint lorsqu’une patrouille des éléments d’élites de cette même opération, saute sur un engin explosif improvisé le 22 août 2022. Cette dernière attaque bien qu’elle ne soit pas expressément revendiquée, laisse penser aux combattants du GNIM, lorsqu’on se réfère à ces activités de pose de mines à l’Est du Burkina. Mais aussi à la Katiba du Gourma burkinabè qui s’étend au gourma togolais dont l’émanation est bien le gourma malien, qui s’illustre depuis 2017, avec des engins explosifs improvisés, contre les positions des FDS, mais aussi contre des routes et des ponts.
Déjà courant juillet 2022, ces mêmes combattants postés à Pognon- Sankoado, en terre burkinabè dans la province de la Kompienga, à 15 km de la frontière du Togo, contrôlant les pièces des usagers de la route, avaient proféré des menaces contre les autorités togolaises, les accusant d’avoir saisi leur bétails, estimés à plusieurs milliers. Ils avaient enjoint aux usagers, notamment les déplacés burkinabè qu’ils avaient chassé de dire aux togolais qu’ils étaient les commanditaires et égorgeurs des villageois de Blamonga, Kpembolé et Kpekankandi, lesquels étaient supposés, selon les dires, les collaborateurs des autorités togolaises. Un message que les proches des victimes étaient censés transmettre , selon les ordres desdits égorgeurs, après qu’ils eussent finis leurs besogne.
La menace terroriste prise au sérieux...
Les militaires et les autorités locales rencontrés à l’époque avait pris les menaces au sérieux , à cause de nature des incidents, mais aussi à cause des armes utilisées lors des attaques. Des mesures telles que le changement du commandement avec l’arrivée du colonel Latiébè Kombaté, connaisseur du terrain et des réalités locales, avec son équipe avait changé l’allure des combats. Les antécédents comme l’embuscade de Gouloungoussi dans la préfecture de Cinkassé, dans la corne ouest du pays et la mise de la région sous l’état d’urgence sécuritaire pour 90 jours,permettait à l’autorité militaire d’opérer en Etat de guerre.Au cours de cette période, de milliers de militaires affluaient vers la région ; des détachements et des posts sont crées d’Est en Ouest.
Les villages ciblés par les terroristes vidés de leurs populations
Le 24 juillet, l’autorité demande aux populations de Tambima, Kpembolé, Kpékankandi, Sankartchogou, Blamonga, Tchimouri de quitter leurs villages pour élire domicile à Tambate, chef-lieu du Canton de Koundjoaré. Dans la journée du 24 et 25 les villages se vident et laissent la place à l’armée. Lesdits villages font frontières avec le Burkina, soit en moyenne une quinzaine de kilomètre, au plus proche et 25 km le plus éloigné.On explique aux populations qu’il s’agit de la défense de l’intégrité territoriale.
La discipline et le professionnalisme de l’armée togolaise....
Des villages libérés des populations civiles, l’armée entre en action. A partir de là, l’armée amorce des opérations d’offensive, neutralise un certains nombre assaillants, mais aussi repoussent d’autres vers le Burkina voisin. Ce qui sont arrêtés sont soumis aux interrogatoires et nombreux libérés après les enquêtes, à en croire quelques leaders de la communauté peule.
Ils mettent à contribution leurs hélicoptères de combats et des drones , puis repousse la nébuleuse jusqu’au-déla des frontières avec le Burkina.Des frappes sont menées jusqu’à plus de 15 km en terre burkinabè, ce qui a permis de débusquer un certains nombre de combattants. Les populations témoignent de l’engagement des militaires pour la sécurité de la région.
La collaboration des civils
Face au choc , les populations civiles appelaient à l’aide aux militaires après l’égorgement des civils courant juillet.L’arrivée des militaires fut comme une bouffée de sauvetage.Elles mirent leur contribution au renseignement et permirent à l’armée de connaître des pistes et barrer à la route à la progression des groupes extrémistes. L’armée a pour le moment de langage avec les populations civiles, ce qui est un atout. L’armée a la population de son coté.La population a pour l’instant une oreille attentive aux consignes des militaires. Il y a un respect mutuel sur la route, mais aussi lors des visites et des contrôles.
L’avantage du non éclatement des incursions et la petitesse des zones de conflit
La frontière terrestre entre le Burkina Faso et le Togo est longue de 126 kilomètres officiellement, d’autres sources parlent de 141 km, de l’Est à l’Ouest.Une frontière mince et petite, au regard des effectifs et du professionnalisme de l’armée togolaise, estimé officiellement, à 855.OOO hommes et officieusement à plus de 15.0000 hommes. Aussi, la zone des activités ne dépasse pas 75 km et est localisée dans le nord-Est du pays.Il s’agit d’une incursion localisée entre le canton de Pognon, l’Est du canton de Koudnjoaré et le nord -est du canton de Mandouri. Les villages infestés sont connus, et il s’agit des villages vidés.Ce qui est un atout d’encadrement et de formation de cercle autour de l’ennemi , afin qu’il ne prospère pas.Entre autres, l’oeust du pays est quasi-urbanisé avec des villages jumelés entre le Ghana, le Burkina et le Togo. La forme rectangulaire du Togo est un avantage pour contrôler tout suspect venant du Nord , notamment coté burkinabè.
Le processus de désenclavement rapide des localités
Il y a un processus en cours de désenclavement des localités frontalières avec des routes bitumées,des plaque solaires par endroit, du courant électrique, des ponts, des marchés
Les fouilles et le contrôle des pièces d’identités
Les militaires postés contrôlent les usagers des routes à l’entrée des principales localités, mais aussi dans des villages frontaliers avec le Burkina.
Pour l’instant, le mécanisme de l’armée permet de contenir l’avancée de la nébuleuse.Plus d’un mois après les attaques meurtrières, les populations notent une accalmie. Cependant, le manque de communication sur les actions de l’armée, la difficulté des journalistes d’accéder à la zone, l’absence de prise en charge continue des déplacés internes, notamment l’absence des services sociaux de base constitueront à la longue un handicap, si rien n’est fait pour remédier à cela.
A ceci vient s’ajouter la collaboration à long terme avec le Burkina et le Bénin, afin de déminer totalement la zone et de libérer ces faunes qui servent de cachettes à la nébuleuse. Mais aussi préparer le retour des déplacés dans leurs villages avec la présence de l’administration et la police dans plusieurs localités de la frontières.
Il faut réhabiliter les écoles vétustes et construire les besoins sociaux de base dans plusieurs localités qui manquent de tout.Gagner la confiance de la population, en suscitant le patriotisme par la création de l’emploi , mais aussi des mécanismes qui leur permettent de ventre leurs produits des champs.
Il convient de continuer d’outiller les militaires sur les réalités locales, afin d’encourager adhésion des populations à leur cause.Cela consiste à œuvrer pour le maintien du respect des droits de l’homme, mais aussi le minimum en lien avec le droit international humanitaire.
Au regard de la place qu’occupe les autorités locales, il faut envisager des contacts réguliers avec les chefs coutumiers et les guides religieux.
Sans surtout oublier, que sans la pacification du Burkina et du Bénin, la nébuleuse continuera ses incursions, d’ou la nécessité d’oeuvrer à libérer totalement le Burkina Faso.
Aider à rebâtir des concessions détruites lors des attaques.Des champs, des vivres , des concessions endommagés lors des opérations de défense et d’offensives pourraient se reconstruire avec les communautés, dans l’optique d’accroire le caractère républicain de l’armée.Les militaires devraient éviter leurs jargons, « nous sommes venus vous aider» mais plus tôt aller dans le sens de la lutte pour la libération du pays.
Edouard Kamboissoa Samboé
Observateur des groupes armés extrémistes au nord Togo
Crédit: Photo, ministère des Armées